Les enjeux
La loi de 2014 « portant réforme ferroviaire » a abrogé la réglementation du travail spécifique aux cheminots de la SNCF, au profit de règles communes à l’ensemble des salariés des opérateurs ferroviaires. Les organisations syndicales présentes au niveau de la branche ferroviaires négocient actuellement avec l’UTP (représentant les entreprises ferroviaires) l’un des éléments clés de la nouvelle réglementation : la convention collective ferroviaire nationale.
Repère : Ont soutenu cette réforme : UNSA – CFDT. Ont combattu ou ont émis de fortes réserves sur le texte : CGT-SUD-FO-FiRST-CFE CGC. Les autres syndicats de la SNCF n’ont pas fait clairement part de leur position.
Le contexte
La loi fixe une date butoir aux négociations : le 30 juin. D’ici là devraient être promulgués ou validés : le « décret-socle » complété par la convention collective elle-même éventuellement complétée par des accords d’entreprises. Pari complètement impossible à tenir dans un délai aussi court, sauf à ce que les nouvelles règles de travail aient été préalablement arrêtées et soient imposées aux syndicats.
Les premiers échanges entre partenaires sociaux témoignent d’une nette volonté du patronat d’imposer des reculs sociaux, dont le décret-socle porte les germes. Extrait du communiqué d’un des syndicats d’accompagnement de la SNCF : « Le corps social des salariés du rail reste très préoccupé par l’approche patronale qui ne porte à ce jour que sur des propositions régressives, très éloignées du souci de l’efficacité du système et du maintien d’un haut niveau social ».
Repère : la réforme de 2014 portait en son sein l’ensemble des ingrédients permettant d’organiser puis de légitimer les reculs sociaux. Remettre à entièrement à plat une réglementation dans un contexte où l’équilibre des forces ne joue pas en faveur des salariés ne peut qu’aboutir à un recul des acquis. D’autant que la SNCF elle-même, qui a inspiré la réforme ferroviaire, n’a jamais caché cet objectif.
Qui appelle ?
Parmi les syndicats qui appellent à la grève figurent bien sûr les opposants historiques à la réforme. A noter que, pour l’instant, FO fait bande à part, sans doute excédée par la main mise de la CGT, au demeurant sectaire, sur l’organisation des actions. FO était plutôt favorable à une action le 28. A signaler que SUD a fait également, un temps, partie des syndicats réservés sur le choix de la date.
Repère : CGT – SUD – FiRST- UNSA – CFDT appellent à l’action le 26 avril, FO le 28. A noter que les deux syndicats UNSA et CDFT n’ont aucune légitimité à appeler les cheminots à l’action, dans la mesure où les reculs sociaux qui se profilent sont la conséquence directe et prévisible de la réforme qu’ils ont soutenue.
La grève risque-t-elle d’être suivie ?
Le nombre de syndicats appelant à la grève impacte directement la mobilisation. 6 syndicats sur les neuf que compte la SNCF ont clairement exprimé leur opposition aux reculs sociaux qui semblent se profiler. Cet appel sera entendu. Pour autant, la multiplication des grèves carrées, toujours en ordre dispersé, risque d’affecter, même à la marge, cette mobilisation. A l’inverse, la grogne actuelle, les mouvements entretenus par une partie de la jeunesse et d’autres coordinations pourraient alimenter cette même mobilisation avec toujours un risque d’embrasement. Rappelons que l’origine du conflit de 95, qui bloqua la France durant une bonne quinzaine de jours, reste inconnue. Elle fut le fruit d’un contexte particulier et échappa, à un moment, à tout contrôle syndical. Attention aux effets dominos ! Hors ce type d’événement imprévisible, l’on peut donc tabler sur une mobilisation globale supérieure à 30 %, avec plus de 50 % de grévistes au niveau du personnel roulant (impact important sur le trafic).
Repère : la multiplication des grèves carrées peut parfois conduire au renforcement d’une action, ou à son affaiblissement. En 2010, deux puissantes confédérations renvoyaient l’ascenseur au Gouvernement qui avait modifié les règles de représentativité syndicales en leur faveur : en multipliant les mouvements isolés, qui débouchent rarement sur de nombreuses avancés, ces deux syndicats avaient délibérément tué la mobilisation contre une nouvelle réforme des régimes de retraites.
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